La garde partagée
Définition
La garde partagée correspond à un intervalle; il y a garde partagée lorsque l’enfant passe de 40 à 60 % de son temps avec chaque parent, c’est-à-dire de 146 à 219 jours par année. Lorsque l’enfant passe plus de 60 % de son temps avec l’un de ses parents (220 jours et plus par année), il est question d’une garde exclusive.
Critères d’établissement
Plusieurs critères doivent être analysés afin de décider s’il est dans l’intérêt de l’enfant qu’une garde partagée soit établie à son endroit. Les six principaux sont les suivants :
- l’intérêt et la stabilité de l’enfant;
- la capacité parentale de chaque parent;
- la capacité des parents de communiquer entre eux et l’absence de conflits;
- la proximité ou l’éloignement de leur résidence respective;
- l’absence d’une contre-indication particulière;
- le désir de l’enfant, lorsque celui-ci a l’âge et la maturité nécessaires.
L’intérêt et la stabilité de l’enfant
La notion de stabilité de l’enfant peut amener à deux interprétations différentes : a) favoriser le maintien de la relation avec la personne qui s’est occupé davantage de l’enfant depuis sa naissance, et b) favoriser le maintien de contacts fréquents entre l’enfant et chacun de ses parents malgré la séparation. Ainsi, au moment de la rupture, on constate que le critère de la stabilité peut s’interpréter autant en faveur d’une conclusion de garde partagée qu’en faveur d’une conclusion de garde exclusive. Également, la stabilité a trait au maintien du lien entre l’enfant et sa fratrie (frère, sœur, demi-frère, demi-sœur). Dans le choix d’une modalité de garde, la cour tient compte de la possibilité pour l’enfant de maintenir des contacts fréquents avec la fratrie.
Par ailleurs, si vous désirez qu’une garde partagée soit instaurée, il est préférable que celle-ci le soit dès la rupture du couple. En effet, plus l’enfant vit longtemps en garde exclusive, plus il est difficile de modifier la situation afin d’instaurer une garde partagée. Alors, si au moment de la rupture un parent impose sa vision de la modalité de garde à l’autre parent, par exemple, en refusant des contacts entre l’enfant et ce dernier, il est important de saisir la cour rapidement de cette situation. Autrement, le temps pourra jouer contre vous.
La capacité parentale de chaque partie
La capacité parentale a trait aux habiletés des parents à prendre soin de l’enfant. Par exemple, ce critère peut être un obstacle dans les cas où un des parents s’est peu occupé de l’enfant par le passé, que le parent souffre d’une maladie (dépression, alcoolisme, etc.) ou qu’il a un mode vie inapproprié pour le développement de l’enfant (vente de drogues, laisse l’enfant à lui-même durant de longues périodes, etc.). Dans le cadre de ce critère, ce n’est généralement pas la capacité parentale en soi qui empêche l’instauration d’une garde partagée, mais bien l’absence de disponibilité du parent. Par exemple, si un parent travaille à temps plein de nuit, il peut être difficile d’instaurer la garde partagée d’un enfant d’âge scolaire, les horaires du parent et de l’enfant étant fort différents. Par contre, le fait qu’un parent travaillait beaucoup, avant la rupture, afin d’assumer les obligations financières de la famille, n’est pas un élément fatal à l’instauration d’une garde partagée. En effet, un parent qui travaillait énormément lorsque les parents formaient un couple peut décider d’organiser son horaire différemment, à compter de la rupture, afin de permettre l’instauration d’une garde partagée.
La capacité des parents de communiquer entre eux et l’absence de conflits
Afin que soit instaurée une garde partagée, les parents doivent pouvoir échanger minimalement sur la situation de leur enfant. L’enfant ne doit pas être impliqué dans les conflits entre ses parents.
La proximité ou l’éloignement de leurs résidences respectives
Pour qu’une garde partagée soit instaurée, la distance doit être suffisamment restreinte pour que l’enfant puisse fréquenter la même école durant chaque période de garde.
L’absence d’une contre-indication particulière
Une contre-indication particulière peut militer contre la garde partagée, par exemple, la maladie de l’enfant ou lorsque les parents ont des points de vue fondamentalement différents en regard de l’éducation ou des soins de santé.
Le désir de l’enfant, lorsque celui-ci a l’âge et la maturité nécessaires
Généralement, entre 8 et 11 ans, le désir de l’enfant est un facteur important, mais non déterminant. Par contre, l’opinion libre et éclairée de l’enfant de 12 ans, sans lier le tribunal, est largement déterminante.
Garde partagée ou garde exclusive : la tendance des tribunaux
L’extrait suivant d’un jugement de la Cour supérieure est fréquemment repris par les tribunaux, dont la Cour d’appel :
« De l’avis du tribunal, cela signifie que, lorsque la capacité parentale de chacun des parents est bien établie et lorsque ceux-ci sont prêts à consacrer le temps et les ressources requis pour le mieux-être de leurs enfants et qu’il n’y a pas de contre-indications, tels des motifs psychologiques (développement de l’enfant non encore adéquat), géographiques (nécessité de déplacements prolongés), éducatifs (incompatibilité des projets de développement proposés par chacun des parents), de santé (nécessité de continuité de certains soins spécialisés), la garde conjointe doit être envisagée très sérieusement. Le fait que l’un des parents n’y consente pas ou qu’il existe certaines difficultés de communication entre les parents ne fait pas alors obstacle à ce type de garde. »
Cet extrait fait état de l’ouverture de la Cour à octroyer la garde partagée lorsque les deux parents ont une bonne capacité parentale, qu’ils sont disponibles, que les résidences des parents sont rapprochées et qu’il n’y a pas de contre-indications particulières. De plus, on y constate que la difficulté de communication n’est pas, à elle seule, un obstacle à la garde partagée. Il est tout de même à noter que l’extrait mentionné ne traite pas du désir de l’enfant, un critère dont il est important de tenir compte plus l’enfant est âgé et mature.
En ce qui a trait aux enfants en bas âge (0 à 3 ans), il faut savoir qu’il n’y a pas de règle voulant qu’une mère soit plus apte à s’occuper de ceux-ci. Au cours des dernières années, le vent a tourné en matière de garde d’enfants et plusieurs décisions confient maintenant aux parents la garde partagée de leur enfant en bas âge. Cette garde partagée peut être implantée immédiatement selon une alternance une semaine-une semaine, mais elle peut aussi faire l’objet d’un calendrier de progression du temps de garde menant ultimement à une garde partagée. Également, plusieurs décisions vont opter pour des échanges fréquents selon les modes « 3-2-2-3 » ou « 5-2-2-5 » jours entre les parents.
Le présent document est un aide-mémoire seulement et ne remplace pas l’opinion de votre avocat ou notaire.
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© Lalonde Geraghty Riendeau inc., 2017